Un « Je t’aime » entouré de barbelés, ou comment distinguer la goutte d’or, dissimulée au milieu du plomb.J’ai reçu une balle en plein cœur, me dit-elle. Une goutte d’or entourée de plomb brûlant.
Sans préavis, elle m’a atteinte avec la force de son désespoir, et la violence d’une colère accumulée.
Sur l’instant, je n’ai vu que le plomb.
Je me suis recroquevillée.
Choc, incompréhension. Mais pourquoi ? Comment ?
Mon cœur ramasse ses morceaux, puis se referme en hâte, avec sa passagère clandestine, acide et noire, logée à l’intérieur.
Puis le silence se fait.
Je prends le temps de me recentrer, de rétablir mon intégrité, semaines après semaines.
Les mois passant, l’émotionnel se calme, et le plomb entré par effraction s’écoule lentement de mon cœur.
Devinez ce qui reste, me demande-t-elle, lovée dans un recoin, attendant d’être reconnue, mise en lumière ?
Il en aura fallu du temps, pour entrevoir l’éclat doré qui se cachait sous ce manteau de goudron puant et douloureux. Un Je t’aime maladroit, entouré de barbelés. Prononcé par un prince transformé en dragon de colère.
Il en aura fallu du temps, de la respiration, du ressenti subtil.
Elle me regarde, me sourit, et me demande d’un air malicieux : Finalement n’est-ce pas cela, l’alchimie ? Distinguer le plomb de l’or ?
Un Je t’aime entouré de barbelés, ça reste un Je t’aime, me direz-vous.
Mais les barbelés qui déchirent le cœur, je n’en veux pas.
Je peux tout entendre, ajoute-t-elle, sauf la méchanceté.
Et puis, me dit-elle, le dragon ne s’est par excusé. Il est retourné se murer dans le silence de son donjon.
Elle ajoute tristement : Peut-être est-il noyé dans son océan de plomb, ne distinguant pas lui-même sa propre Lumière, sa propre goutte d’or. Puisse-t-il un jour faire ce travail d’alchimie pour son propre Cœur.
Combien de Cœurs d’or se cachent derrière une couche de plomb ?
Combien de Chevaliers de Coupes se confondent eux-mêmes avec leur dragon ?
Et combien de Je t’aime sont lancés maladroitement, et qui ne sont pas identifiés comme tels, tout cet or perdu dans le vent de l’amertume et de l’incompréhension.
Le Chemin vers Soi est long et incroyablement exigeant. Mais que d’apprentissages précieux, pour soi, pour notre relation au Monde.
